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mot de passe: hirondelle
« C’est dans un train comme ça qu’ils nous ont emmenés. Un train à bestiaux. On était tout mélangés là dedans. Pas de chaises. Rien. Pas à boire. Pas à manger. Rien. (…) Et à Montreuil Bellay ils nous ont appelés pour du pain. Ma mère elle pleurait tellement… On n’ y a pas été. On a privé notre ventre. (…) Ils nous ont appelés par nom. Même dans le camp, trois fois par jour qu’on était appelés. Et s’il en manquait un, ils allaient le chercher dans la cabane. (…) Ils le mettaient au gnouf. »
Violette Gurême, extraits du film « Pour RIEN. », Marie Auger, avril 2018
Violette Gurême a 15 ans quand elle est arrêtée puis internée avec toute sa famille au camp de Moisdon La Rivière en Loire Inférieure. Pendant plus de 2 ans et demi, avant de s’en évader en 1943 lors d’un bombardement, elle sera ainsi enfermée avec ses parents et ses frères et soeurs dans les camps de Châteaubriand (Loire Inférieure), Mulsanne (Mayenne) et Montreuil Bellay (Maine et Loire). Comme 6500 autres nomades, forains et circassiens, elle fut dès 1939 assignée à résidence sur ordre de l’Etat français. Ce fut aussi le cas pour la famille de Raymond Gurême, futur beau-frère de Violette, adolescent à l’époque. Un matin de l’automne 40 au petit jour, un escadron de gendarmerie frappa violemment aux portes des roulottes. « Debout là-dedans! « . Et tous furent arrêtés: le père, la mère, le frère aîné René, et les 6 petits nés après Raymond. On leur confisqua tous leurs biens: verdines, chapiteau de cirque, matériel de projection de films de leur cinéma ambulant, argent, bijoux, photographies…. Leurs précieux animaux disparurent de la circulation. Après la guerre rien ne leur fut rendu. Aucun dédommagement ne leur fut accordé. Plus d’un voyageur fut ainsi contraint à se sédentariser pour survivre en exerçant des professions de « gens de maison », la plupart ne pouvant racheter ce qui leur avait été pris.
Comme les Juifs à la même époque ils furent enfermés arbitrairement.
« Pour RIEN. » , dira Violette 72 ans après la fermeture du dernier camp français d’internement pour nomades.
Aujourd’hui les noms de Linas-Montlhéry, Montreuil-Bellay, Choisel, Moisdon-la-Rivière, Plenée Jugon, Saliers, Rivesaltes, Le Barcarès, Argelès-sur-mer …, sont synonymes pour les nomades de traumatismes non entendus, non apaisés. A entendre les témoignages de Violette et Raymond et en allant sur les lieux de ces anciens camps, on perçoit un MANQUE très vif à cet endroit de la MEMOIRE COLLECTIVE: camps non signalés géographiquement ou détruits, visites des lieux rendues impossibles par l’occupation contemporaine des sols, plaques commémoratives inexistantes, négligées et/ou placées en des endroits contrariant toute possibilité de recueillement et tout rassemblement… Sans parler du silence des manuels scolaires…